Un inventaire du patrimoine immobilier au printemps 2026

Grange, Habitation

Le patrimoine bâti agricole est en train de s’effacer lentement du paysage rural québécois. Alors que dans d’autres pays les gouvernements et organismes s’affairent à protéger tant les paysages culturels patrimoniaux que le patrimoine bâti, le Québec semble seulement s’intéresser à cet enjeu.
C’est en 2021 que la modification de la Loi sur le patrimoine culturel demande aux MRC de produire ou de mettre à jour un inventaire des bâtiments construits avant 1940 se trouvant sur leur territoire. Cette même année, un paysage de Rivière-Ouelle, dans le comté de Kamouraska, était désigné comme le premier paysage culturel patrimonial au Québec, en vertu de cette même loi. « Légalement parlant, ça protège le paysage ici. On ne peut pas le transformer à outrance, on ne peut pas construire des blocs à condos aux abords de la route et du fleuve. Dorénavant, on veut protéger, préserver la beauté de notre paysage », avait déclaré la députée de Côte-du-Sud de l’époque, Marie-Ève Proulx.
Si un paysage peut être classé comme patrimoine culturel (donc ne pouvant être altéré), on peut se demander pourquoi les bâtiments agricoles qui habitent nos paysages ruraux continuent de dépérir sans que personne ne s’en préoccupe.
De nouvelles constructions, adaptées aux pratiques agricoles actuelles, voient le jour et menacent les bâtiments traditionnels. Mais bien plus que de simples granges, silos ou « sheds », ces bâtiments sont des témoins de l’évolution de l’occupation du territoire rural d’hier à aujourd’hui.
Plusieurs MRC, soucieuses de préserver cette richesse patrimoniale, ont décidé de s’attaquer au problème en cataloguant et documentant ce type de bâtiments. La Loi sur le patrimoine culturel du Québec s’applique pour quelques-uns d’entre eux (méthode d’évaluation de l’intérêt patrimonial comportant 19 critères d’évaluation et deux critères de pérennité), évitant ainsi leur démolition. La MRC du Haut Saint-François adoptera d’ailleurs son inventaire du patrimoine immobilier le 1er avril 2026. Il permettra de déterminer quels bâtiments doivent respecter les règlements municipaux sur la démolition, l’occupation et l’entretien.
« Quelques municipalités de notre MRC avaient déjà effectué des inventaires dans le passé, mais ce sont des inventaires qui visent un secteur spécifique de la municipalité, tel que le cœur villageois et concerne strictement le patrimoine résidentiel et non le patrimoine agricole. Il est en effet assez récent que les MRC s’intéressent au patrimoine agricole de leurs régions », a expliqué Chloé Southam, agente de développement en patrimoine immobilier à la MRC du Haut-Saint-François. Elle ajoute que : « Depuis avril 2023, chaque municipalité de la MRC du Haut-Saint-François est dotée d’un règlement de démolition permettant à la municipalité locale d’encadrer le processus d’autorisation des demandes de démolition, entre autres par la prise en compte de critères d’évaluation relatifs à la valeur patrimoniale des bâtiments et d’y inclure des dispositions particulières applicables aux immeubles patrimoniaux. »
Pourtant, en sillonnant les routes de la MRC, les bâtiments agricoles en piètre état sont nombreux, certains étant simplement abandonnés. « L’inventaire du patrimoine immobilier, le règlement de démolition et le règlement d’occupation et d’entretien sont les trois moyens qui sont un ensemble d’outils qui permettront aux municipalités de prendre des actions concrètes afin de contribuer à la préservation et la mise en valeur de notre patrimoine immobilier », conclut l’agence de la MRC. Souhaitons qu’ils permettent de contrôler les situations de vétusté ou de délabrement des bâtiments et, dans le cas des immeubles patrimoniaux, de veiller à la préservation de leur valeur patrimoniale.
L’automne tire à sa fin, la beauté des paysages de la MRC du Haut-Saint-François est à son comble. Souhaitons que la grande majorité de ces magnifiques bâtiments agricoles, qui y sont nichés depuis des centaines d’années pour plusieurs, puissent témoigner encore longtemps de la richesse du patrimoine naturel et bâti de la MRC.

Par Sophie Marais

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